À partir de l’année scolaire 1957, les sœurs de la charité de Jésus et Marie fondèrent, dans la grande ville minière congolaise de Lubumbashi, une école normale : « Spes Nostra » (Notre Dame de l’Espérance). L’école se développa très vite. En 1973, lors de la zaïrinisation, l’école devint « institut Tshondo » (uniquement des filles). Il comprend maintenant deux sections : biochimie cycle long et math physique cycle long. L’école héberge beaucoup de ses élèves.
Le lycée Tshondo « Spes Nostra », Notre Dame d’espérance, accueille environ 1500 jeunes filles de 11 à 18 ans. Un lycée pauvre mais bien tenu et bien sécurisé.
Traditionnellement, on fête l’anniversaire de la fondation de l’école le 30 mai, mais, remarquait sœur Marguerite, cette fête patronale n’était pas vraiment une fête patronale puisqu’on ne fêtait pas la « patronne », c’est-à-dire Notre-Dame d’espérance, Spes Nostra.
Alors, bien que 85% des élèves ne soient pas catholiques, sœur Marguerite a voulu introduire d’une manière spéciale la mère de Jésus dans le lycée. Elle acheta une statue de Notre-Dame (de Lourdes) et voulut la placer dans une grotte. Comme il n’y a pas beaucoup d’argent, les élèves ont ramassé les pierres (des « moignons ») pour la bâtir, et la construction commença par la première pierre, le 15 février 2020. Les maçons, non catholiques, n’avaient jamais bâti de grotte, ils s’arrêtaient dans le travail pour demander à la Vierge Marie comment il fallait faire… Un père de famille s’offrit pour forger la grille, une dame offrit les carreaux du pavement.
L’inauguration, le 29 mai 2020, fut vécue d’une manière digne.
Sœur Marguerite demanda au maire de la ville de pouvoir organiser une marche de pèlerinage, depuis la paroisse Notre Dame de la Paix jusqu’à l’école. On fit alors une belle procession avec des fleurs et des bougies, des chants et des cris de joie. Une grande partie des participants n’étaient pas catholiques, mais tout le monde a voulu participer.
Lorsque des élèves ont des peines ou des soucis, elles écrivent souvent une lettre et la déposent dans la grille de la grotte. On les voit venir, seules ou en petit groupe, et revenir réconfortées, les témoignages sont nombreux.
De plus, c’est le lieu d’un grand rassemblement de toute l’école le jeudi matin à 7h, à l’intérieur ou à l’extérieur du petit l’enclos de la Vierge Marie.
Et chaque année, on fait une neuvaine avec tous les élèves, avant la fête patronale, car Marie est sainte, très sainte, et la fête ne consiste pas seulement à danser, mais à avoir préparé son cœur.
Sœur Marguerite a voulu que les jeunes participent au charisme des sœurs de la charité de Jésus et de Marie, le charisme de la charité, le charisme de voir qui est vulnérable et de lui venir en aide.
Il s’agit de venir en aide avec leurs propres petits moyens : privation de bonbons, de goûter, et même du prix du transport, les jeunes filles allant en groupe, marchant jusqu’à 10 kms, pour économiser l’argent du transport.
Ainsi, trois exemples :
Pour préparer le Nouvel An, les jeunes furent invitées à regarder autour d’elles quelles étaient les personnes âgées délaissées. Ces personnes ont été invitées à l’école le jour de l’an, il y a eu une belle Messe et chaque personne vulnérable a reçu un colis de plusieurs kilos, et l’on se cotisa aussi pour leur offrir le billet de transport !
A Lubumbashi il y a une grande prison de 2500 prisonniers, hommes ou femmes. La nourriture fournie est insuffisante, et diverses associations leur viennent en aide. Les jeunes filles se sont cotisées et sont venues pour apporter d’importants dons de farine et autres nourritures, ce jour-là il y eut une belle Messe dans la cour de la prison, et beaucoup de joie.
Éduquées à faire attention aux personnes vulnérables, des merveilles adviennent. Dans une classe, il y avait une jeune fille aux vêtements très usés, qui n’allaient pas. La classe, sans rien dire, s’est cotisée pour elle. Elles vont alors voir la directrice, sœur Marguerite, avec les tissus qu’elles ont achetés, et sœur Marguerite s’est occupée de faire coudre des vêtements neufs pour cette jeune fille, à son insu (les dames savent juger de sa taille en la regardant). Quelle surprise émouvante pour elle de se retrouver ainsi fraîche et belle, grâce à l’amitié de sa classe !
L’amour de Marie est grand dans ce lycée. Et chaque année, il y a des baptêmes, des premières communions, des confirmations. Les témoignages sont parfois assez musclés, par exemple, l’une des plus jeunes élèves, récupéra des images de la Vierge Marie pour les afficher chez elle, sur son lit, puis dans le séjour, mais le pasteur (sa famille n’était pas catholique), vint demander à son père de corriger cela. Forte de ses 12 ans, elle résista en disant : au lycée, les jeunes sont apaisées, ici, vous me faites des histoires pour ma conviction, si vous continuez, je quitte la maison pour rester pensionnaire au lycée, et tout le monde la laissa tranquille.
Sœur Marguerite dit aussi : c’est la Vierge Marie elle-même qui fait tout cela, je ne suis que son instrument.
Propos recueillis à Lubumbashi, le 27 janvier 2024, par Françoise Breynaert